Faire Corps

On croit souvent, au premier regard, que chacun est à sa place, là où il doit être. Mais cette impression n’est qu’une illusion. Cette série de 25 images invite le spectateur à questionner ce qu’il perçoit au premier coup d’œil, à interroger des scènes du quotidien qui paraissent anodines. Sommes-nous réellement à l’endroit où nous voulons être ? Faisons-nous vraiment ce que nous désirons ? La société nous pousse à croire que oui, que chacun s’inscrit naturellement dans un ensemble cohérent, qu’il soit individuel ou collectif.

Ce projet se compose d’une seule série découpée en cinq scènes. Chaque scène suit la même ligne directrice et se décline en cinq images qui racontent un fragment de vie d’un personnage. L’idée est de créer un effet cinématographique, d’inviter à une lecture continue. Un personnage fait le lien entre chaque scène, comme si à partir d’un seul individu naissait un arbre de connexions infinies. On suit une rencontre, puis une autre, chaque personnage portant à son tour une histoire, une solitude, une envie d’ailleurs. C’est une manière de dire que nous sommes tous liés, d’une façon ou d’une autre.

Chaque scène débute par une sensation d’unité : un plan large, où les personnages semblent connectés – par leurs émotions, leurs tâches, leur appartenance à un même groupe. Mais plus on avance, plus une dissonance se révèle. Un personnage détonne, rêve d’autre chose, semble étranger à l’instant partagé.

La série s’ouvre sur un goûter d’anniversaire en famille. Un samedi après-midi classique : des rires, des discussions, une célébration ordinaire. Pourtant, le personnage central aspire à l’évasion, il étouffe dans cette routine cyclique. On le retrouve ensuite lors d’une soirée télé en famille ; mais cette fois, c’est sa sœur qui prend la lumière. Elle ne se sent pas à sa place, prisonnière de liens familiaux qu’elle ne choisit plus vraiment.

Puis, changement de décor : un bar en fin de journée, des amis se retrouvent autour d’un verre. L’ambiance est festive, mais certains dissimulent d'autres intentions, et le malaise s’installe. La quatrième scène nous plonge dans un flot de travailleurs marchant au même rythme, tels des soldats. Une cadence imposée où l’esprit de compétition et les jugements dominent. Enfin, on découvre un couple semblant uni, presque fusionnel – mais dont l’amour n’est en réalité qu’un pansement sur un vide intérieur.

À travers ces cinq histoires, c’est une réalité silencieuse qui se dévoile : celle de ces êtres qui, malgré les apparences, se sentent déplacés, désaccordés. Des situations familières, des visages ordinaires, mais des tourments invisibles. La société tend à nous enfermer dans nos solitudes, à nous faire croire que nos malaises sont uniques. Pourtant, il suffit de lever les yeux pour comprendre que nous ne sommes pas seuls.

PHOTOGRAPHER / AD: Thomas Tanquerel

MODELS: Lili Avenel, Manon Tassart, Alissa Belanger, Clara Bellet, Romane Simoneau

REALISATION: 2022 -2023

Précédent
Précédent

Les Maquereaux